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LE SCOLASTICAT


monde ; l’Ariccia, près des forêts ; Genzano, le village en fleur ; le lac de Nemi, si profond dans son lit de verdure et si bleu, et partout l’ossuaire immense de la campagne romaine ; à l’horizon lointain, dans le beau soleil, comme une barre d’or en fusion, la Méditerranée.

Chaque jour, c’était une excursion nouvelle. On poussa jusqu’à Frascati : les pentes des montagnes, les jardins, les ombrages, la villa Aldobrandini avec ses fontaines en cascades ; la villa Piccolomini, où Baronius écrivit ses Annales, la villa Lanceloti, d’autres encore, et partout les aqueducs, les tombeaux, les ruines, et toujours l’horizon radieux. Le frère Verjus ne se lassait point de regarder, et il poussait des cris d’admiration : « Quels spectacles splendides ! » Et son âme volait à Dieu : « Mon Jésus, je vous offre toutes les actions de grâces que vous avez inspirées à vos serviteurs en face de ces gracieux ouvrages de vos mains. Donnez-moi de bien lire sous ces sacrements où vous êtes caché[1] . »

On n’oubliait point les églises dans ces promenades quotidiennes, et le Frère multipliait ses pactes avec les anges des tabernacles. C’était, au fond de son âme, de la joie perpétuellement renouvelée. Une chose pourtant l’attristait : le petit nombre des fidèles. « On s’étonne, disait-il, que la révolution va de progrès en progrès. À qui la faute ? » Et il répondait tout droit et nettement : « Aux prêtres ! Pourquoi aux prêtres ? Parce qu’ils se contentent des dehors de la religion. Des processions, des illuminations, c’est bien ; ce n’est pas assez. Le peuple est ignorant, instruisez-le. Vous ne l’instruisez pas. Il faut le pénétrer de vérité et de vie chrétienne : or, il ne sait point les éléments de sa religion, et il en va de même partout. » Et le Frère se souvenait des conversations qu’il avait eues à ce sujet en Espagne avec le P. Marie. Le P. Marie lui disait souvent : Le clergé de ce pays a besoin d’une révolution pour le réveiller ; le mal grandit tous les jours. Les bons

  1. 24 septembre et 3 octobre.