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PRÉPARATION AUX MISSIONS

et que les moyens humains leur manquent. C’est au Cœur de Jésus à tout faire. Où vont-ils descendre ? Qui leur fera leur pauvre maison ? Que ne suis-je là-bas ! Je leur aiderais à la construire, à se nourrir, à se vêtir sur cette plage inhospitalière où ils sont peut-être. Mon Dieu, soyez leur Providence[1]. » Quelques jours plus tard, le bruit courait que quatre hommes de la colonie de Port-Breton avaient été mangés par des anthropophages devant un cinquième condamné à prendre sa part de l’horrible festin, et le frère Verjus écrit : « Mon Dieu, faites que cela ne décourage ni nos Pères, ni nos vénérés supérieurs. S’il faut que quelqu’un soit mangé, que ce soit moi ! Je ne suis guère bon qu’à cela[2]… » Le 19 février 1882, arrivé à Rome le frère Georges Durin. On se souvient qu’il accompagnait son oncle en qualité de Frère coadjuteur pour la Nouvelle-Guinée. Cette arrivée soudaine et absolument inattendue fut au scolasticat comme un coup de foudre. Le frère Verjus multiplie d’abord les questions ; mais le R. Père supérieur, jugeant à propos de ne pas répondre, le Frère écrit : « Je vais à la chapelle, je prie, je pleure, je conjure le Cœur de Jésus de ne pas nous abandonner, et je m’offre comme victime pour le salut de nos chères Missions. Le courage ne me fait pas défaut ; au contraire ! Je sens que les épreuves sont le signe du triomphe… » Et il conclut de la sorte : « Sois un saint et le Sacré Cœur hâtera ton bonheur. » Quelques heures plus tard, il apprend de la bouche du frère Georges que son oncle l’a quitté à Brindisi et qu’il rentre en France. Un supérieur qui abandonne son poste… — le lecteur n’a pas oublié par suite de quelles circonstances pour ainsi dire fatales, — est-ce que, du même coup, l’œuvre ne va pas crouler ? Le frère Verjus renouvelle son acte d’immolation complète : « S’il faut une victime, ô mon Dieu, me voici ! Faut-il du sang ? prenez le mien. Si notre chère Société doit payer le tribut avant d’entrer en Nouvelle-Guinée, oh ! prenez-moi, mon Dieu… Il

  1. 14 janvier.
  2. 20 janvier ; 10 février.