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Page:Vaudon - Monseigneur Henry Verjus, 1899.djvu/356

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L’APÔTRE

M. Lawes lui fait visite. Le Père l’accueille poliment mais froidement. Il lui représente ce que sa conduite a d’anormal et de singulier. — Au surplus, c’est une maladresse que vous faites là, car l’ignorance du « teacher » éclatera bientôt, même aux yeux des sauvages. Le ministre n’en laisse pas moins son catéchiste à Rabao. Il annonce la visite prochaine du gouverneur et il s’en va. Mais, avant de partir, il avait déblatéré dans le village contre les Missionnaires catholiques. Le P. Verjus l’apprit bientôt. Au reste, il n’eût pas tardé à s’en apercevoir à la réserve des indigènes et même à l’éloignement de plus d’un. Quand il passait par le village, on ne s’empressait plus autour de lui. On affectait même de ne point le remarquer. Il avait beau sonner la classe, les enfants n’entendaient point la cloche. « Je suis bien persuadé, écrivait-il dans son Journal[1], que le bon Maître seul peut nous sauver. Il faut donc nous sanctifier d’abord et le bon Dieu fera de ses coups… Si j’étais seul au village, je suis sur que le bien se ferait et assez vite ; mais, au moment où, possédant la langue un tant soit peu, je puis dominer les sauvages, voilà le démon qui nous suscite un obstacle humainement insurmontable. Dieu soit mille fois béni ! »

Cette froideur des naturels et surtout cet arrêt brusque dans son apostolat sont durs au cœur du Missionnaire. Il faut que le « teacher » disparaisse. Le Père ira voir, à Port-Moresby, le gouverneur qui tarde à venir. Le 31 juillet, il part. Mais, voici que, chemin faisant, il rencontre à Resdscar-Head, le bateau du gouverneur qui, précisément, se rendait à Yule. M. Douglas invite le Père à monter à bord. Son bateau suit. On rentre de concert. Le gouverneur visite le village et paraît enchanté. Il recommande aux « teachers » et aux sauvages de vivre en bonne harmonie avec le Missionnaire catholique. Celui-ci, porteur d’une lettre de sir Douglas pour M. Lawes, partira le 5 août pour Port-Moresby. En trois jours et trois nuits, non

  1. Journal, 16 juillet.