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— 1800 - 1807 —

tendant et à sa famille de vastes établissements domaniaux en Italie et les indemnités pécuniaires les plus splendides.

Bonaparte, évidemment, n’avait pu autoriser une semblable ouverture. Il s’en est toujours défendu avec chaleur. Quel intérêt, en effet, pouvait avoir, pour lui, cette renonciation ? quel bénéfice en aurait-il retiré ? Il voulait régner sans doute ; mais il ne pouvait précisément ceindre la couronne qu’en vertu du principe qui avait renversé les Bourbons, le principe de la souveraineté nationale ; et il y aurait eu de sa part une étrange maladresse à vouloir s’appuyer sur des droits de famille contre lesquels la France venait de protester par dix ans d’une guerre acharnée, et qu’elle proscrivait encore dans la personne des frères du dernier roi. Les autorités prussiennes de Varsovie obéirent-elles à une inspiration de propre mouvement, ou à des instructions venues de Berlin, ainsi qu’on l’a dit ? ou bien leur démarche fut-elle provoquée, encouragée, par Louis XVIII lui-même, désireux, dans ce moment d’abandon absolu, de rappeler l’attention sur sa personne et sur sa cause ? Nous n’affirmons rien. Ce qui est certain, c’est qu’au mois de mars 1803 M. de Meyer, président de la régence de Varsovie, fit à Louis XVIII la proposition de renoncer au trône, et que ce prince remit au fonctionnaire prussien cette réponse si connue :

« Je ne confonds pas M. Bonaparte avec ceux qui l’ont précédé ; je lui sais gré de plusieurs actes d’administration, car le bien que l’on fera à mon peuple me sera toujours cher ; mais il se trompe s’il croit m’engager à transiger avec mes droits : bien loin de là, il les établirait lui-même, s’ils pouvaient être litigieux, par la démarche qu’il fait en ce moment.

J’ignore quels sont les desseins de Dieu sur ma race et sur moi ; mais je connais les obligations qu’il m’a imposées par le rang où il lui a plu de me faire naître. Chrétien, je remplirai ces obligations jusqu’à mon dernier soupir ; fils de saint Louis, je saurai, à son exemple, me respecter jusque dans les fers ; successeur de François Ier, je veux du moins pouvoir dire comme lui : Tout est perdu, fors l’honneur. »

Cette lettre cachait une grande habileté sous une forme