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— 1814 —

affectueux et le plus empressé, ce ministre lut dans le Moniteur l’ordonnance qui le remplaçait par le duc de Dalmatie[1]. Le maréchal Soult convenait à sa nouvelle position ; mais la factice exaltation de son royalisme devait produire les mêmes résultats que l’incapacité de son prédécesseur. Avide d’honneurs et de pouvoir, le duc de Dalmatie n’avait pas le cœur au niveau de son ambition ; et si, comme tous les caractères sans noblesse, personne ne se montrait plus docile à tous les despotismes, plus humble devant la puissance, comme eux, il affectait envers ses subordonnés une énergie et une rudesse qui, tout d’abord, soulevèrent contre lui l’opinion publique et l’armée.

Quelques jours avant l’entrée du maréchal au ministère, un de nos plus braves généraux de cavalerie, le comte Excelmans, ancien grand écuyer de Murat, s’était vu l’objet d’une espèce de censure ministérielle qui avait sa cause dans les faits suivants.

Le bruit de la déchéance de Murat et de la restauration des Bourbons de Sicile avait couru, vers le milieu de novembre, dans quelques salons royalistes de Paris ; des nouvelles arrivées de Vienne ne tardèrent pas à annoncer que le congrès, loin de songer à déposséder Joachim, venait au contraire de vérifier les pouvoirs de ses ambassadeurs. M. Andral, médecin de Murat, retournait à Naples, après un assez court séjour à Paris.

  1. On profita de l’occasion pour donner un titulaire au ministère de la marine, vacant depuis la mort de M. Malouet, arrivée le 7 septembre ; cette position devait appartenir à un administrateur consommé ou à un marin : ce fut le directeur général de la police du royaume, M. Beugnot, qu’on y nomma. La direction qu’il quittait fut donnée à un émigré, ancien conseiller au parlement d’Aix, M. Dandré.
    M. Dandré, absent de France depuis longues années, étranger par les habitudes de toute sa vie à ses nouvelles fonctions, était incapable de les remplir. M. Beugnot n’ignorait pas moins les affaires de son département ; lui-même le reconnaissait tout haut. On raconte que, lors de la visite que lui rendirent, à son installation, les principaux employés de son ministère, il leur dit : « Messieurs, je vous vois avec le plus grand plaisir. Chacun de vous connaît le travail de sa division ; tant mieux, car, pour moi, je n’en sais pas le premier mot. »