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— 1815 —

tion des Bourbons de Naples, une sorte dintérêt actuel, et devenait, pour M. de Talleyrand, une sorte de nécessité.

La restauration des Bourbons alors réfugiés en Sicile manquait au complet rétablissement de cette famille sur les trois trônes qu’elle possédait en Europe. Louis XVIII avait fait de cette réintégration la loi politique de son plénipotentiaire à Vienne, et M. de Talleyrand avait dû formellement la demander, dans deux notes, qu’il déposa sur la table du congrès les 15 et 19 décembre. Or Murat, qu’il s’agissait de renverser, n’avait traité qu’avec deux puissances, l’Angleterre et l’Autriche. L’Angleterre, par l’occupation de la Sicile et par sa marine ; l’Autriche, par la possession du nord de l’Italie, tenaient, en outre, dans leurs mains le sort de Naples et du royaume napolitain. L’intérêt spécial de la dynastie qu’il représentait et l’intérêt général de la France se réunissaient donc, aux yeux de M. de Talleyrand, pour exiger la réalisation du système d’alliance que, dans ses jeunes années et pendant une partie de son âge mûr, il avait tant admiré, et qui devait faire le but unique des efforts de sa vieillesse.

Le public officiel de Vienne n’était pas dans la confidence de cette politique rétrospective, de cette fidélité d’un vieillard aux souvenirs d’un autre siècle : il ne comprenait pas comment, placé entre la Russie, l’Angleterre et l’Autriche, M. de Talleyrand, dans toutes les questions, se liguait avec les deux dernières puissances contre la première. Non-seulement la position géographique et les intérêts de la Russie indiquaient cette cour à notre alliance ; mais la réinstallation des Bourbons sur le trône était surtout l’ouvrage de son souverain ; cette puissance, d’un autre côté, ne profitait pas de nos dépouilles ; elle ne nous demandait rien et ne pouvait rien nous enlever : l’Angleterre et l’Autriche, au contraire, nos antagonistes obligés, nos adversaires de tous les temps, ne se faisaient pas faute, l’une et l’autre, de largement s’agrandir à nos dépens. L’intérêt de famille ne suffisait pas pour expliquer la préférence du représentant de la cour des Tuileries : « Murat détient la