Page:Vauvenargues - Œuvres posthumes éd. Gilbert.djvu/125

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CORRESPONDANCE. 100 Je vous trouve fort heureux d’etre A portee de voir M. de Montesquieu, et d’entendre parler un homme qui a si bien écrit. On ne presume pas qu’il ait, dans la conversation, tout l’esprit qui parait dans ses ouvrages; il aurait trop d’avantage sur les autres hommes; mais cela ne gete rien, et l’amour-propre y souscrit. Je suis {Ache que vous ayez perdu ma premiere lettre, puisque vous aimez les impertinences; elle en etait toute remplie. Vous avez devine un des heros du duel? c’est etre bien penetrant : ily avait tant de gens, A Aix, que vous pou- viez nommer I Le champion de Pepin, c’ est d’Arbaud * ; mais ne me citez pas, je vous en prie : puisqu’ils se sont battus ~ une fois, ils pourraient bien se battre encore, et je D,8i1I}8 pas assez la gloire pour la defendre contre tous ses ennemis; leur nombre m’intimide trop. ll y en a peu cependant qui lui fassent une guerre ouverte, et Pepin disait, l’autre jour, qu’aux occasions ou elle est interessee, il ne se possede pas. ll contait, A ce sujet, que madame d’Agut * fut insultée dans la rue; vous connaissez sa figure : elle defend sou honneur; aussi ne Pattaquait-on pas; l’insulte ne pouvait avoir rien d’engageant. Elle se jette dans la maison de madame de Bro- glio *, criant : Je viens d’etre insultee! on assassine l’abbe Blanc! Elle dit, et s’evanouit. —- Pepin jouait au quadrille; il met l’epee A la main, et vole au secours de I’abbe, mais il ne trouvait point la porte; un paravent la lui cachait, il se jette tout au travers, et le perce de mille coups. Dans ce temps-lh, voile l’abbe qui entre, et qui rassure tout le monde : on eut bien envie de rire. Mais que pensez-vous de Pepin: Si l’on mettait ce caractere sur le theatre, croirait· on qu’il est pris dans la nature? Vous ne vous plaindrez pas, pour cette fois, de ne pas voir assez de mon ecriture; j’a.i commence cette lettre dans • Fils d’Andre·Elzear d’Arbaud, seigueur de Jouques et do Gardanne, Pne- sident au Parlement de Provence. — G.

  • Femme d’un conseiller au Parlement. — G.

‘ Branche, aujourd’bui eteinte, de l’illustre famille de Broglie. — G.