Page:Vauvenargues - Œuvres posthumes éd. Gilbert.djvu/57

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DIALOGUES. 41 mime genie dont vous dtiez jaloux comme poets. La seule chose qui m’ait étonné, c’est que Votre Eminence alt favorisé des écrivains indignes de sa protection'. RICHELIEU. Je suis venu dans uu mauvais temps, mon cher Corneille; il y avait peu de gens de mérite pendant mon ininistere, et je voulais encourager les hommes d travailler, en accor- dant une protection marquee a tous les arts; il est vrai que je ne vous ai pas assez distingué : en cela jesuis trés—bla· mable. ‘ ‘ ’ conm-:u.L1·:. · Moins que veut bien avouer Votre Eminence. Il est vrai que j’avais quelque génie; maisje n’étais pas courtisan; j’avais , naturellement, cette inilexibilité d’esprit que j’ai donnée si souvent a mes béros. Comme eux, j’avais une vertu dure, un esprit sans délicatesse et trop resserré dans les homes de mon art; il n"est pas étouuant qu’un grand mi- nistre, accoutumé aux devoirs et a la ilatterie des plus puis- sants de l’Etat, ait négligé un homme de mon caractere. _ MGHBLIBU. ‘ Ajoutez que je u’ai point counu tout ce que vous valiezi Mon esprit était peut-étre resserré , comme Ie votre, dans les bornes de son talent; vous n’aviez pas l’esprit de la cour, ‘ et moi, je n’avais pour leslettres qu’un gout défectueux ’. · • On peut citer parmi ces écrivains Desmarets, Colletet, Fare: et Chape- lain. II admit quelque temps le grand Corneille dans cettetmupe; mais le mérite de Corneille se trouva incompatible avec ces poetes , et il fut. aussitot exclu. Richelieu faisait des vers, et ce tut meme pour faire représenter la trngédie de Miramc, dont il avait donné le sujet, et dans laquelle il avait fait · plus de cinq cents vers, qu’il tit bstir la salle du Palais-Royal. - B.

  • On vent absolument que le cardinal de Richelieu alt été jaloux des suc-

céa de Corneille: cela me paralt aussi vraisemblable que si Racine eut été jaioux des victoires du grand Condé. Boileau est le premier qui nit. accrédité cette opinion en disam : En vain contre ls Cid un ministre seligue; Tout Paris pour Cliiméne a lcs yeux de Rodrigue. On en conclut, ce qui n’était peut-etre pas dans la peusée du poete, que Richelieu n’avait pu voir sans jalousie le triomphe de Corneille. Foutenelle