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Page:Verhaeren - Œuvres, t9, 1933.djvu/186

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œuvres de émile verhaeren


Et vous allez, ainsi, vers les lointains pays,

Au delà de Quiévrain, de Reims et de Paris,
Dans la Beauce ou la Nièvre,
Vivre aux abois,
Pendant trois mois

De hâte et de labeur, de sueur et de fièvre.


Mieux que d’autres, vous abattez les vieux travaux.

Frustes, mais durs, lents, mais têtus, lourds, mais dispos,
Vos corps, dès le matin, s’arc-boutent et puis cognent
Le mur quotidien des compactes besognes,
Et chaque soir, quand les ombres prennent leur vol,

Un large pan de travail fait gît sur le sol.


Même les dimanches, au bruit battant des cloches,

Vous engrangez quand même orges, seigles, froments,
Et semaine à semaine, on vous solde dûment

La paie au reflet d’or qui s’amasse en vos poches.


Et quand vous revenez, après combien de jours,

Par les chemins déjà connus, vers votre bourg
Et son clocher debout sur l’âpre Escaut de Flandre,
Vous regardez les gens avec des yeux changés,
Et leurs champs et leurs clos vous sont comme étrangers,

Et d’autres mots sur vos lèvres se font entendre.