Aller au contenu

Page:Verhaeren - Œuvres, t9, 1933.djvu/269

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.
267
les plaines
Bousculer tout à coup ce repos moite et flasque ;

Elle entrera avec la pluie et la bourrasque,
Mouillant sa croupe énorme et ses gros cheveux roux,
Et, sous le bétail gourd qui surgira debout,
Comme des blocs de chair du fond de l’ombre terne,
S’accroupira sur l’escabeau carré,
Et longuement entre ses doigts serrés
Étirera les pis brusquement éclairés
À la lueur de sa lanterne.

Et quand, ses seaux pendus à ses deux bras,
Avec son lait fumant et gras,
Elle aura regagné à la hâte les caves,
Le bétail lent, pensif et grave,
À sa torpeur retombera.
Et dans la paix, l’ennui, la somnolence,
Le monotone et sourd mâchonnement,
Interrompu quelques moments,
Reprendra cours invariablement
Jusques à quand, dans le silence ?

Et l’étable, sous les brumes profondes
Et les vents d’ouest qui flagellent les mondes,
N’attendra rien des jours immensément pareils,
Avant que mars, sur les pâtures molles
N’allume à son soleil

Les simples fleurs parmi les herbes bénévoles.