Page:Verhaeren - Les Flammes hautes, 1917.pdf/180

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

Leur parler à travers l’émoi de son feuillage.
Ils lui disaient leur peur en face du nuage
Qui rôdait plein de foudre à l’horizon subtil.
L’un voulait fuir sans lutte et l’autre se défendre ;
Tous différaient d’avis, quoique voulant s’entendre,
Si bien qu’il lui fallait assumer le péril
D’entraîner seul, là-bas, en quels itinéraires !
Ces mille arbres nourris de volontés contraires.

S’il les menait ainsi, c’est qu’il savait agir :
Son vouloir était dur, mais son geste était souple.
Pour les mieux exalter, il les rangeait par couples
Et dès qu’au loin il entendait les vents rugir,
Sans hésiter jamais, il se mettait en route.
Eux le suivaient, abandonnant dispute et doute,
Heureux de retrouver un chef dans le danger.

Ils adoraient alors et son geste enragé
Et son cri despotique à travers les tumultes.
Par les soirs éclatants ou par les nuits occultes,