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Page:Verhaeren - Les Heures du soir, 1922.djvu/136

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Ton cœur s’y fit plus sûr, plus simple et plus humain ;
Nous y avons aimé les gens des vieux villages,
Et les femmes qui nous parlaient de leur grand âge
Et de rouets déchus qu’avaient usés leurs mains.

Notre calme maison dans la lande brumeuse
Était claire aux regards et facile à l’accueil,
Son toit nous était cher et sa porte et son seuil
Et son âtre noirci par la tourbe fumeuse.

Quand la nuit étalait sa totale splendeur
Sur l’innombrable et pâle et vaste somnolence,
Nous y avons reçu des leçons du silence
Dont notre âme jamais n’a oublié l’ardeur.

À nous sentir plus seuls dans la plaine profonde
Les aubes et les soirs pénétraient plus en nous ;
Nos yeux étaient plus francs, nos cœurs étaient plus doux
Et remplis jusqu’aux bords de la ferveur du monde.