Page:Verhaeren - Les Tendresses premières, 1904.djvu/61

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Et les jaunes soucis, et les glaïeuls vermeils,
Et les lys seuls, et les multiples labiées,
Pareils à des gouttes de lune ou de soleil,
Dans les galons et les bosquets éparpillées.

Et les chemins s’y promenant souples et clairs
Et côtoyant l’étang et ceignant la pelouse
Et, tout à coup, disparaissant tels des éclairs,
Sous le massif obscur que tapissent les mousses.

Et les liserons bleus, et les liserons roux
Envahissant la haie épaisse et festonnée
Où de grands coqs, taillés dans l’if ou dans le houx,
Perchaient touffus et verts, depuis cinquante années.

Tel était-il pour tous les gens,
Avec ses hêtres d’or et ses trembles d’argent,
Le vieux jardin dont on disait « le nôtre ! »
Mais pour mon cœur, mais pour mes yeux,
Mais pour mon rêve audacieux,
Il était autre.