Page:Verhaeren - Les Villes tentaculaires, 1920.djvu/24

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C’est la plaine, la plaine
Où ne vague que crainte et peine.

Les rivières stagnent ou sont taries,
Les flots n’arrivent plus jusqu’aux prairies,
Les énormes digues de tourbe,
Inutiles, arquent leur courbe.
Comme le sol, les eaux sont mortes ;
Parmi les îles, en escortes
Vers la mer, où les anses encor se mirent,
Les haches et les marteaux voraces
Dépècent les carcasses,
Pourrissantes, de vieux navires.

C’est la plaine, la plaine
Immensément, à perdre haleine,
Où circulent, dans les ornières,
Parmi l’identité
Des champs du deuil et de la pauvreté,
Les désespoirs et les misères ;
C’est la plaine, la plaine