Page:Verhaeren - Parmi les cendres.djvu/36

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Ce dont l’âme rêvait devant les tabernacles,
Ce que la foi montrait de ciel aux yeux humains,
Ils l’ordonnaient, patiemment, avec leurs mains
Pour que leur œuvre fût comme un calme miracle.

La claire vision des paradis nouveaux,
Ils l’évoquaient en un tranquille paysage ;
Ils le peuplaient de beaux et solennels visages
Tournés vers la splendeur et la paix de l’agneau.

Les douces fleurs poussaient dans le tapis de l’herbe ;
De petits bois montaient, naïfs et recueillis ;
C’était la Flandre, avec ses prés et ses taillis,
En un cercle de toits et de clochers superbes.

Au milieu, sur un tertre ornementé, l’autel.
Le Dieu y répandait son sang dans le calice ;
Il s’entourait des signes noirs de son supplice ;
Lance, colonne, croix et l’éponge de fiel.

Et vers ce deuil offert comme un banquet de fête
À la faim de l’extase, à la soif de la foi,
Les martyrs, les héros, les cent vierges, les rois,
Les ermites, les paladins et les prophètes,

Toute l’humanité des temps chrétiens marchait.
Ils arrivaient du fond miraculeux des âges,
Ayant cueilli la palme aux chemins du voyage,
Et sur leurs fronts brillaient les feux du Paraclet,