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les moines


À l’horizon, par où les longs chemins perdus
Marchent vers le matin, à la lueur des chaumes,
Flottent, au son du vent, des formes de fantômes
Qui rasent les gazons de leurs pieds suspendus.

Car c’est l’heure où, là-bas, les Anges, en guirlande,
Redescendent cueillir, mélancoliquement,
Dans les plaines de l’air muet, le lys dormant,
Le lys surnaturel qui fleurit la légende.

On les rêve passant sur les cimes, où luit,
Comme des baisers d’or, l’adieu de la lumière,
Ils vont par le sentier, le champ et la bruyère,
Et, le doigt sur la bouche, ils écoutent la nuit.

Et tel est le silence éclos autour du cloître
Et le mystère épars autour de l’horizon,
Qu’ils entendent la pure et belle floraison
Du pâle lys d’argent sur les montagnes croître.