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Page:Verhaeren - Poèmes, t1, 1895, 2e éd.djvu/207

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les moines

D’abord s’avance au pas le héros Godefroi,
Levant sur l’Orient la croix occidentale,
Le duc de Normandie en vêtements d’orfroi,
Pierre l’Ermite, assis sur sa mule âpre et raide,
Bohemond, Adhemar, Hugues de Vermandois,
Robert de Flandre, et là, fier entre tous, Tancrède.
La gloire est magnifique à ces faiseurs d’exploits.
On lutte à corps serré, pied à pied, et les casques,
Les heaumes, les armets, sonnent clair sous les coups,
Les glaives vont tournant en sanglantes bourrasques,
On s’agrippe : Chrétien dessus, Maure dessous,
Roulent noueusement dans le flux des mêlées,
Des cimeterres bleus luisent, éclairs de deuil,
Heurtant d’un choc d’acier les masses dentelées,
Et les pennons tenus debout comme un orgueil.
Les cœurs sont furieux, les têtes allumées.
On entend le grand cri : Notre-Dame et Noël !
Et cet emmêlement des deux larges armées
Fait croire un long instant que le heurt est réel.

Les Turcs creusent les rangs de sanglantes ornières ;
Les Chrétiens vers le ciel, d’un regard plus fervent,
S’exaltent ; on ne sait laquelle des bannières