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poèmes

Assis, les pieds croisés sur les foudres papales.

C’était au fond de ces monastères hautains
Que le dogme du Christ, ouvrant ses bras au monde,
S’armait pour l’avenir et forgeait ses destins.
Les moines travaillés de passion féconde,
Portant des cœurs de fer dans leurs torses de feu,
Trop lourds pour s’appuyer sur la raison fragile,
Dans les buccins faisaient sonner le nouveau Dieu.
Sur un pavois de guerre ils dressaient l’Évangile,
La garde de leur glaive était sculptée en croix,
Saint Michel écrasait la payenne Bellone,
Et Rome avait un roi qui par-dessus les rois
Haussait un front bâti pour la triple couronne.

Ils trônèrent pareils, les cloîtres lumineux,
Jusqu’au jour où les vents de la Grèce fatale
Jetèrent brusquement leurs souffles vénéneux
À travers la candeur de l’âme occidentale.
Le monde émerveillé s’emplit d’esprit nouveau.
Mais les moines soudain grandirent à sa taille,
La puissance monta des bras à leur cerveau :
Eux qui jadis, géants d’orgueil de la bataille,