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poèmes


Ils ont passé rêveurs, muets, hagards et seuls,
Toujours découragés d’eux-mêmes,
Laissant l’éclat des diadèmes
À d’autres fronts et se vêtant de leurs linceuls.

Après, se regardant, inquiets et des choses
Et des autres — et sans amours ;
Et néanmoins cherchant toujours
Sur les fumiers du monde à se nourrir de roses.

Lointainement par les grands mirages tentés,
Et par les gloires médusaires,
Mais peur des vices nécessaires,
Et du cynique assaut de tant d’hostilités.

Leurs bras, rameaux tendus vers le printemps des rêves,
Sont retombés, — et pas un fruit,
Pas une fleur d’or ou de nuit,
Jamais, pas un seul rut de feuilles ni de sèves.