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les villages illusoires

Sans même avoir touché l’immobile mystère.

Le fossoyeur remue, à coups de bêche,
Avec ses bras maigres et las,
— Depuis quels temps ? — la terre sèche.

Et les voici, pour son angoisse et son remords,
Les pardons refusés à ceux qui avaient tort.

Et les voici les pleurs muets et les prières,
Qu’il n’a point écoutés, dans les yeux de ses frères.

Et les voici l’insulte aux humbles et aux doux
Et le rire, quand ils ployaient les deux genoux.

Et le sarcasme aride ou le reniement sombre,
Devant le dévouement offrant ses mains dans l’ombre.

Le fossoyeur ardent et las,
Cachant son mal, au son des glas,
Fatigue, à coups de bêche,
La terre sèche.