encore. La sagesse de sa facture fait place à une ardeur comme suprême et les coups de brosse violents et sauvages remplacent les traits mesurés et scrupuleux. À lui seul une telle étrangeté était permise. Tout autre se serait perdu dans le jeu et le tumulte d’un tel travail. Bien plus, quand il peint les rehauts d’un vêtement, l’orfèvrerie d’un joyau, la lumière d’un brusque et soudain éclairage, son pinceau devient comme un outil d’émailleur, et burine, et cisèle, et gratte, et fouille, et empâte, si bien que l’œuvre semble tributaire de plusieurs mains d’artistes. Rembrandt s’enivre de son métier, lui demande tout ce qu’un homme surhumain en peut tirer. S’il n’était un génie, on le prendrait pour un fou. Et cependant, c’est en ce travail suprême qu’il donne toute sa mesure, et qu’il s’impose surtout le maître de tous les maîtres.
Sa couleur évolue autant que sa technique. Rugueuse, sèche et cuite au début, elle s’assouplit presque immédiatement. D’une harmonie à base de jaune, elle descend à une tonalité dont les notes sonores vont du bleu au vert, pour bientôt se concentrer dans les tons retentissants ou les bruns et les roux assourdis. Ses premières œuvres notoires sont traitées ainsi. La plupart de ses portraits, le sien d’abord, ceux de Marguerite van Bilderbeecq et du calligraphe Coppenol, appartiennent à ce mode de colorer les choses. Le ton uni et fort dans les visages s’exalte sur fond sombre. Tandis que les portraitistes en renom, les Mierevelt et les Ravesteyn s’attachaient avant tout à rendre tout le ton local de l’objet, Rembrandt, obéissant