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Page:Verlaine - Œuvres complètes, Vanier, IV.djvu/306

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mémoires d’un veuf

au contraire de Mérat, s’asseyait, épongeait son front, passait une main fiévreuse dans sa lourde chevelure, caressait en hâte sa moustache, et d’une voix encore entrecoupée s’écriait : « Vous ne savez pas ? Bonhommet est mort, et ce que le drôle s’est permis de dire après cet incident !!! » puis il racontait avec un air d’émotion indignée une énormité qu’il venait d’ajouter à la légende du héros d’une de ses plus remarquables nouvelles, un bourgeois monstrueux, sorte de bouc émissaire qu’il chargeait de tous les péchés de l’Israël académique et voltairien, Bonhommet, pour nommer l’animal par son nom, Bonhommet qui est à Prudhomme ce qu’un caïman de première férocité serait au lézard de nos jardins. Puis, plus de Villiers,il s’évanouissait dans un adieu aussi fantastique que son récit. Anatole France, un vieux livre sous le bras, trouvaille d’érudit sans frein, faite à l’instant sur le quai, au sortir de « la Mazarine » entrait, suivi d’Emmanuel des Essarts, le Parisien en province par hasard à Paris pour peu d’heures, ou d’Albert Glatigny engagé de la veille à l’Alhambra, comme « improvisateur », et déjà regrettant Armentières et Carpentras pour amour du Roman Comique, — d’autres encore, comme eux brillants, convaincus, ardents, — parce que sûrs de leur talent. Les entretiens duraient le plus souvent, coupés par le dîner ès restaurants des environs pour la plupart de ces jeunes gens, jusqu’à minuit