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mes prisons

Ces diversions néanmoins n’étaient pas mes seules.

J’inventai un jeu.

Ça consistait à mâcher du papier en deux boulettes, à supposer deux adversaires, A et B, à lancer ces projectiles alternativement vers un but qui était le judas de la cellule et à marquer loyalement les coups.

Double plaisir. D’abord de perdre ou de gagner. Ce que A détestait B, B le lui rendait si bien ! Puis de redouter le passage de l’adjudant ou d’un sergent. Ou, alors ! du Directeur lui-même.

Il est vrai que c’est celui-ci que je redoutais le moins.


XII


Jésus, comme vous vous y prîtes-vous pour me prendre ?

Ah !

Un matin, le bon Directeur lui-même entra dans ma cellule.

— Mon pauvre ami, me dit-il, je vous apporte un mauvais message. Du courage. Lisez !

C’était une feuille de papier timbré, la copie du jugement en séparation de corps et de biens, si mérité quand même (de corps ! et peut-être aussi de biens ?) mais dur dans l’espèce ! que me décer-