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critique et conférences

de se comprendre dans ce martyrologe, voici quelques notes que je me fais un plaisir de mettre à sa disposition.

M. Barbey d’Aurevilly est un homme d’esprit, c’est incontestable, et l’esprit, surtout chez nous, est un pavillon qui fait passer bien des marchandises, ce qui est en même temps notre éloge et notre condamnation. Je ne veux pas médire de l’esprit. C’est un petit air de musique qui fait bien dans les entr’actes de la logique, mais qui ne doit jamais empiéter sur elle, sous peine de la faire trébucher dans le vaudeville, genre national. Or, c’est, je crois, un peu le cas de M. Barbey d’Aurevilly.

Si vous aimez la poésie, ennemi lecteur, j’en ignore et, au surplus, c’est votre affaire. Pour moi, je la déteste dans la critique, comme déplacée et dérogeant d’abord, et ensuite comme complice et receleuse. Que diriez-vous d’un botaniste qui vous expliquerait la nervure, la tissure et la membrure d’une plante, avec le style d’un Byron en prose ? Sans doute ce que je dis de M. Barbey d’Aurevilly : qu’il est dans la plus merveilleuse erreur, ou que c’est un adroit compère cachant sous le chatoiement d’un verbiage coloré une science problématique (ceci n’a trait qu’au botaniste). Je ne prétends pas établir par là que, pour être bon critique, il soit indispen-