Page:Verlaine - Jadis et Naguère, 1891.djvu/93

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« Longtemps, longtemps rasant la terre,
Discrets, loin derrière eux, tandis
Qu’ils allaient au pas militaire,
Nous marchâmes par rangs de dix,

« Passant les fleuves à la nage
Quand ils avaient rompu les ponts.
Quelques herbes pour tout carnage,
N’avançant que par faibles bonds,

« Perdant à tout moment haleine…
Enfin une nuit ces démons
Campèrent au fond d’une plaine
Entre des forêts et des monts.

« Là nous les guettâmes à l’aise,
Car ils dormaient pour la plupart.
Nos yeux pareils à de la braise
Brillaient autour de leur rempart,

« Et le bruit sec de nos dents blanches
Qu’attendaient des festins si beaux
Faisait cliqueter dans les branches
Le bec avide des corbeaux.