La loi est en même temps considérée comme étant la garantie de la liberté. Un peuple libre est un peuple qui n’obéit qu’aux lois qu’il a faites lui-même.
C’est là un préjugé fort ancien, mais contre lequel nous prémunissait Mirabeau, déjà en 1772, dans son Essai sur le despotisme, en formulant cette grande vérité que les lois positives sont les pires ennemies de la loi naturelle, qui est la vraie charte de la liberté humaine[1]; et il émettait cette pensée profonde : « Les hommes forgèrent leurs chaînes en établissant leurs législations. »
Ainsi donc ce qu’on appelle liberté, dans le lan-
- ↑ « La nature, » disait Mirabeau, « est une parfaite législatrice, ou plutôt elle est la seule… Loin de rechercher et de développer cette loi naturelle, aussi essentiellement existante que le soleil qui nous éclaire et qui féconde le globe que nous habitons, les législateurs, semblables à ces hommes qui adoraient les ouvrages de leurs mains, ont osé croire qu’il était en leur pouvoir de créer des lois pour l’homme. Que, n’entreprenaient-ils aussi de reculer ou d’avancer à leur gré les saisons ? »
Un des esprits les plus distingués de ce siècle, Charles Comte, — qu’il ne faut pas confondre avec l’illustre auteur de la philosophie positive, Auguste Comte, — a consacré tout un savant ouvrage à développer cette pensée si profonde de Mirabeau. Charles Comte dans son Traité des législations établit que tous les procédés employés jusqu’ici pour rédiger les lois sont plus ou moins défectueux, parce qu’ils reposent tous nécessairement sur un arbitraire plus ou moins dissimulé ou tempéré. Il faut renoncer à faire les lois, il faut travailler à les découvrir ; c’est-à-dire il faut rechercher la loi naturelle.