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deux ans de vacances.

Tous deux jouèrent alors leur rôle de faux naufragés. Toutefois, par crainte d’exciter les soupçons, s’ils se laissaient adresser des questions trop précises, ils se dirent plus accablés de fatigue que de besoin, et demandèrent qu’on leur permît de prendre quelque repos et même de passer la nuit à French-den. Ils y furent aussitôt conduits. À leur entrée, il est vrai, – ce qui n’échappa point à Gordon, – ils n’avaient pu s’empêcher de jeter des regards un peu trop investigateurs sur la disposition du hall. Ils parurent même assez surpris en voyant le matériel défensif que possédait la petite colonie, – surtout la pièce de canon braquée à travers l’embrasure.

Il s’en suit que les jeunes colons, – à qui cela répugnait fort d’ailleurs, – n’eurent point à continuer leur rôle, puisque Rock et Forbes avaient hâte de se coucher, après avoir remis au lendemain le récit de leurs aventures.

« Une botte d’herbe nous suffira, dit Rock. Mais, comme nous ne voudrions pas vous gêner, si vous aviez une autre chambre que celle-ci…

— Oui, répondit Gordon, celle qui nous sert de cuisine, et vous n’avez qu’à vous y installer jusqu’à demain ! »

Rock et son compagnon passèrent dans Store-room, dont ils examinèrent l’intérieur d’un coup d’œil, après avoir reconnu que la porte donnait sur le rio.

En vérité, on ne pouvait être plus accueillant pour ces pauvres naufragés ! Les deux coquins devaient se dire que pour avoir raison de ces innocents, il ne valait pas la peine que l’on se mît en frais d’imagination !

Rock et Forbes s’étendirent donc dans un coin de Store-room. Ils n’allaient pas y être seuls, il est vrai, puisque c’était là que couchait Moko ; mais ils ne s’embarrassaient guère de ce garçon, bien décidés à l’étrangler en un tour de main, s’il s’avisait de ne dormir que d’un œil. À l’heure convenue, Rock et Forbes devaient ouvrir la porte de Store-room, et Walston, qui rôderait sur la berge avec ses quatre compagnons, deviendrait aussitôt maître de French-den.