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LA DESTINÉE DE JEAN MORÉNAS.

plus tard, elle suivait dans la tombe son frère assassiné.

Le sort impitoyable la faisait mourir trop tôt. Elle disparaissait à l’instant où, après tant d’épreuves, une joie allait enfin lui advenir. La terre était à peine retombée sur son cercueil, que son fils aîné, Pierre, reparaissait dans le pays.

D’où venait-il ? Qu’avait-il fait pendant les six années qu’avait duré son absence ? Quelles contrées avait-il parcourues ? Dans quelle situation rentrait-il au village ? Il ne s’expliqua pas là-dessus, et, quelle que fût la curiosité publique, un jour arriva où, de guerre lasse, on cessa de se poser ces questions.

Au reste, s’il n’avait pas fait fortune, au sens complet du mot, il semblait du moins qu’il ne fût pas revenu dépourvu. Il n’exerçait, en effet, que d’une manière intermittente son ancien métier de menuisier et, deux années durant, il vécut presque en rentier à Sainte-Marie-des-Maures, ne s’absentant que rarement pour aller à Marseille, où, disait-il, l’appelaient ses affaires.

Pendant ces deux années, le plus clair de son temps, il le passa, non pas dans la maison qu’il avait héritée de sa mère, mais à l’auberge de l’oncle Sandre, devenue propriété de Marie, et que celle-ci, depuis la mort tragique de son parrain, gérait avec l’aide d’un valet.

Ainsi qu’il était aisé de le prévoir, une