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L’ÉTERNEL ADAM.

installé pour diriger l’exploitation d’une mine d’argent qui m’appartenait en propre. Mes affaires avaient étonnamment prospéré. J’étais un homme riche, très riche même, — ce mot-là me fait bien rire aujourd’hui ! et je projetais de rentrer à bref délai en France, ma patrie d’origine.

Ma villa, des plus luxueuses, était située au point culminant d’un vaste jardin qui descendait en pente vers la mer et finissait brusquement en une falaise à pic, de plus de cent mètres de hauteur. En arrière de ma villa, le terrain continuait à monter, et, par des routes en lacets, on pouvait atteindre la crête de montagnes dont l’altitude dépassait quinze cents mètres. Souvent — c’était une agréable promenade — j’en avais fait l’ascension dans mon automobile, un superbe et puissant double phaéton de trente-cinq chevaux, de l’une des meilleures marques françaises.

J’étais installé à Rosario avec mon fils, Jean, un beau garçon de vingt ans, quand, à la mort de parents éloignés par le sang, mais près de mon cœur, je recueillis leur fille, Hélène, restée orpheline et sans fortune. Depuis cette époque, cinq ans s’étaient écoulés. Mon fils Jean avait vingt-cinq ans ; ma pupille Hélène, vingt ans. Dans le secret de mon âme, je les destinais l’un à l’autre.

Notre service était assuré par un valet de chambre, Germain, par Modeste Simonat, un chauffeur des plus débrouillards, et par deux femmes, Edith et Mary, filles de mon jar-