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Page:Verne - Hier et demain, 1910.djvu/290

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HIER ET DEMAIN.

— Allons donc ! nous écriâmes-nous, à l’unisson.

Ce fut à cet instant précis que survint le cataclysme.

Nous prononcions encore tous ensemble cet : « Allons donc ! » qu’un vacarme effroyable s’éleva. Le sol trembla et manqua sous nos pieds, la villa oscilla sur ses fondements.

Nous heurtant, nous bousculant, en proie à une terreur indicible, nous nous précipitâmes au dehors.

À peine avions-nous franchi le seuil, que la maison s’écroulait, d’un seul bloc, ensevelissant sous ses décombres le président Mendoza et mon valet de chambre Germain, qui venaient les derniers. Après quelques secondes et un affolement bien naturel, nous nous disposions à leur porter secours, quand nous aperçûmes Raleigh, mon jardinier, qui accourait, suivi de sa femme, du bas du jardin où il habitait.

— La mer !… La mer !… criait-il à pleins poumons.

Je me retournai du côté de l’océan et demeurai sans mouvement, frappé de stupeur. Ce n’est pas que je me rendisse nettement compte de ce que je voyais, mais j’eus sur-le-champ la claire notion que la perspective coutumière était changée. Or, cela ne suffisait-il pas à glacer le cœur d’épouvante que l’aspect de la nature, de cette nature que nous considérons comme immuable par essence, eût été si étrangement modifié en quelques secondes ?