Page:Verne - Histoire des grands voyages et des grands voyageurs, Hetzel, 1870, tome 1.djvu/159

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vivres et sans eau, étaient en danger de périr dans l’île de Lobos. Heureusement, les deux chapelains du fort de Lancerote, s’étant rendus au port de l’île Gracieuse, parvinrent à attendrir un patron de nef, déjà outré de la trahison de Berneval. Ce patron leur donna un de ses compagnons, nommé Ximénès, qui revint au fort de Lancerote. Là se trouvait une fragile nacelle que Ximénès chargea de vivres ; puis, s’embarquant avec quatre fidèles de Gadifer, il se hasarda à gagner l’îlot de Lobos, distant de quatre lieues, en franchissant « le plus horrible passage de tous ceux qui sont dans cet endroit de la mer. »

Cependant, Gadifer et les siens étaient en proie aux plus terribles tortures de la faim et de la soif. Ximénès arriva à temps pour les empêcher de succomber. Gadifer, ayant appris la trahison de Berneval, s’embarqua dans la nacelle pour revenir au fort de Lancerote. Il était outré de la conduite de Berneval envers les pauvres Canariens, auxquels le seigneur de Béthencourt et lui avaient juré protection. Non ! jamais il n’aurait pensé que ce traître eût osé faire et machiner ce qu’il avait fait, lui que l’on regardait comme l’un des plus « suffisants » de la compagnie.

Pendant ce temps, que faisait Berneval ? Après avoir trahi son seigneur, il trahissait ses compagnons qui l’avaient aidé à accomplir ses forfaits ; il faisait mettre à terre douze d’entre eux, et partait dans l’intention de rejoindre en Espagne Jean de Béthencourt, et de lui faire approuver sa conduite en lui racontant les choses