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LES CONQUISTADORES DE L’AMÉRIQUE CENTRALE

troupes indiennes furent licenciées, et Pizarre put envoyer Soto et cinq Espagnols à Cusco, ville située à plus de deux cents lieues de Caxamalca, tandis que lui-même soumettait le pays à cent lieues à la ronde.

Sur ces entrefaites, Almagro débarqua avec deux cents soldats. On mit à part pour lui et pour ses hommes, — avec quels regrets, il est facile de l’imaginer, — cent mille pesos ; on réserva le quint du roi, et il resta encore, 528,500 pesos à partager entre Pizarre et ses compagnons. Ce produit du pillage et du massacre fut solennellement réparti entre les ayants-droit, le jour de saint Jacques, patron de l’Espagne, après une fervente invocation à la divinité. Déplorable mélange de religion et de profanation, malheureusement trop fréquent en ces temps de superstition et d’avarice !

Chaque cavalier reçut pour sa part 8,000 pesos et chaque fantassin 4,000, soit quelque chose comme 40,000 et 20,000 francs. Il y avait là de quoi satisfaire les plus difficiles, après une campagne qui n’avait été ni longue ni pénible. Aussi, beaucoup de ces aventuriers, désireux de jouir en paix et dans leur patrie d’une fortune inespérée, s’empressèrent-ils de demander leur congé. Pizarre le leur accorda sans peine, car il comprenait que le bruit de leur rapide fortune ne tarderait pas à lui amener de nouvelles recrues. Avec son frère Fernand, qui allait en Espagne porter à l’empereur la relation de son triomphe et des présents magnifiques, soixante Espagnols partirent, lourds d’argent, mais légers de remords.