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GRANDS VOYAGES ET GRANDS VOYAGEURS

Aussitôt sa rançon payée, Atahualpa réclama sa liberté. Pizarre, qui ne lui avait conservé la vie que dans le but de se couvrir de l’autorité et du prestige que l’empereur avait gardé sur ses sujets et de ramasser tous les trésors du Pérou, fut bientôt obsédé des réclamations du prisonnier. Il le soupçonnait aussi depuis quelque temps d’avoir ordonné secrètement de lever des troupes dans les provinces éloignées de l’empire. De plus, Atahualpa, s’étant aperçu que Pizarre n’était pas plus instruit que le dernier de ses soldats, en avait conçu pour le gouverneur un mépris qu’il ne sut malheureusement pas dissimuler. Tels sont les motifs, bien futiles pour ne pas dire plus, qui déterminèrent Pizarre à faire instruire le procès de l’Inca.

Rien de plus odieux que ce procès dans lequel Pizarre et Almagro furent à la fois juges et parties. Des chefs d’accusation, les uns sont si ridicules, les autres si absurdes, qu’on ne sait vraiment s’il faut le plus s’étonner de l’effronterie ou de l’iniquité de Pizarre, qui soumettait à de telles informations le chef d’un puissant empire sur lequel il n’avait aucune juridiction. Atahualpa, déclaré coupable, fut condamné à être brûlé vif ; mais comme il avait fini, pour se débarrasser des obsessions de Valverde, par demander le baptême, on se contenta de l’étrangler. Digne pendant de l’exécution de Guatimozin ! Forfait des plus atroces et des plus odieux qu’aient commis les Espagnols en Amérique, où ils se sont pourtant souillés de tous les crimes imaginables !

Il y avait encore cependant dans cette tourbe d’aven-