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LES CONQUISTADORES DE L’AMÉRIQUE CENTRALE

Vasco Nuñez de Balboa, de quinze ans plus jeune que Ponce de Léon, était venu en Amérique avec Bastidas et s’était établi dans l’Española. Mais là, comme un grand nombre de ses compatriotes, malgré le repartimiento d’Indiens qui lui avait été attribué, il s’était si bien endetté qu’il ne désirait rien tant que se soustraire aux poursuites de ses nombreux créanciers. Par malheur, un règlement défendait à tout navire en charge pour la Terre-Ferme de recevoir à son bord les débiteurs insolvables. Grâce à son esprit ingénieux, Balboa sut tourner la difficulté et se fit rouler dans un tonneau vide jusqu’au navire qui portait Encisco au Darien. Quoi qu’il en eût, le chef de l’expédition dut accepter le concours si singulièrement imposé de ce brave aventurier qui ne fuyait que devant les recors, comme il le prouva aussitôt débarqué. Les Espagnols, habitués à trouver si peu de résistance dans les Antilles, ne purent soumettre les populations féroces de la Terre-Ferme. À cause de leurs dissensions intestines, ils durent se réfugier à Santa-Maria el Antigua, que Balboa, élu commandant à la place d’Encisco, fonda dans le Darien.

S’il avait pu se faire craindre des Indiens par sa bravoure personnelle, par la férocité de son lévrier Léoncillo, plus redouté que vingt hommes armés et qui recevait régulièrement la paye d’un soldat, Balboa avait également su leur imposer une certaine sympathie par sa justice et par sa modération relative, car il n’admettait pas les cruautés inutiles. Pendant plusieurs années,