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KÉRABAN-LE-TÊTU.

devant cette énormité : avoir été en chemin de fer ! Lui, un vieux croyant !

« Oui ! c’est indigne ! répondit Ahmet, qui pensa que c’était ou jamais le cas de ne pas contrarier son oncle.

— Oui, indigne ! ajouta Van Mitten, mais, après tout, ami Kéraban, il ne vous est rien arrivé de grave…

— Ah ! prenez garde à vos paroles, monsieur Van Mitten ! s’écria Kéraban. Rien de grave, dites-vous ? »

Un signe d’Ahmet au Hollandais lui indiqua qu’il faisait fausse route. Son vieil ami venait de le traiter de : « Monsieur Van Mitten » et continuait de l’interpeller de la sorte :

« Me direz-vous ce que vous entendez par ces inqualifiables paroles : rien de grave ?

— Ami Kéraban, j’entends qu’aucun de ces accidents habituels aux chemins de fer, ni déraillement, ni tamponnement, ni collision…

— Monsieur Van Mitten, mieux vaudrait avoir déraillé ! s’écria Kéraban. Oui ! par Allah ! mieux vaudrait avoir déraillé, avoir perdu bras, jambes et tête, entendez-vous, que de survivre à pareille honte !