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L’AGENCE THOMPSON AND Co.

Du premier coup d’œil il avait été rassuré, en reconnaissant les signes d’un mal de mer provoqué par la grosse houle actuelle. Pour être d’une violence peu habituelle, ce malaise n’en devenait pas plus dangereux.

Toutefois, l’humanité commandait de venir au secours de ces pauvres gens, et Thompson, on doit le dire à sa louange, ne faillit pas à ce devoir. Une heure durant, il leur prodigua des soins dévoués, et ce ne fut pas de sa faute s’ils demeurèrent inefficaces.

Mais, en vérité, il semblait plutôt que l’état des trois frères allait en s’aggravant. Thompson, en outre, remarquait avec inquiétude des symptômes que l’on n’a pas coutume d’observer dans le mal de mer. De temps à autre, les malades, de livides, devenaient tout à coup écarlates. Ils semblaient faire alors des efforts surhumains, pour retomber bientôt épuisés, la respiration sifflante, la peau glacée, la face revenue à une pâleur cadavérique.

Thompson, à sept heures, jugea la situation si critique qu’il fit réveiller Robert. Il éprouvait le besoin d’un conseil.

Robert ne put malheureusement en donner à son chef hiérarchique, et tous deux durent se reconnaître impuissants à soulager les trois malades auxquels le nom de moribonds commençait à mieux convenir.

« Il faut pourtant tenter quelque chose, dit Robert vers huit heures. Si nous essayions de faire aboutir ces nausées qui s’arrêtent toujours à moitié route ?

— Comment ? interrogea Thompson. Connaissez-vous un moyen ?

— L’eau chaude, suggéra Robert.

— Essayons ! » s’écria Thompson qui perdait la tête.

Le moyen héroïque indiqué par Robert fut d’un effet immédiat. Dès le second verre d’eau chaude, les infirmiers improvisés obtinrent la preuve certaine de son efficacité.

Mais qu’ont donc vu Robert et Thompson ? Qu’ont-ils cru voir plutôt ?