Aller au contenu

Page:Verne - L’Étoile du sud, Hetzel, 1884.djvu/114

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.
110
L’ÉTOILE DU SUD.


mort au devoir et à l’honneur, effaçant par l’éclat de son action, a dit un vieux chroniqueur, l’éclat et la vertu du joyau qu’il emportait. »

« Je serais fort surprise, ajouta Alice, en terminant son histoire, si, le cas échéant, l’Étoile du Sud n’inspirait pas un dévouement pareil pendant son voyage ! »

Une acclamation unanime salua ces paroles de miss Watkins, quatre-vingts bras élevèrent un nombre égal de verres, et tous les yeux se tournèrent instinctivement vers la cheminée pour rendre un hommage effectif à l’incomparable gemme.

L’Étoile du Sud n’était plus sur le socle, où, tout à l’heure encore, elle scintillait derrière John Watkins !

L’étonnement de ces quatre-vingts faces était si manifeste, que l’amphitryon se retourna aussitôt pour en voir la cause.

À peine l’eut-il constatée, qu’on le vit s’affaisser sur son fauteuil, comme s’il eût été frappé de la foudre.

On s’empressa autour de lui, on défit sa cravate, on lui jeta de l’eau sur la tête… il revint enfin de son anéantissement.

« Le diamant !… hurla-t-il d’une voix tonnante. Le diamant !… Qui a pris le diamant ?

— Messieurs, que personne ne sorte ! » dit le chef de la brigade de police en faisant occuper les issues de la salle.

Tous les convives se regardaient avec stupeur ou échangeaient leurs impressions à voix basse. Il n’y avait pas cinq minutes que la plupart d’entre eux avaient ou, du moins, pensaient avoir vu le diamant. Mais il fallait bien se rendre à l’évidence : le diamant avait disparu.

« Je demande que toutes les personnes soient fouillées avant de sortir ! proposa Thomas Steel avec sa franchise ordinaire.

— Oui !… oui !… » répondit l’assemblée d’une voix qui semblait être unanime.

Cet avis parut rendre une lueur d’espoir à John Watkins.

L’officier de police fit donc ranger tous les convives sur l’un des côtés de la salle et commença par se soumettre lui-même à l’opération demandée. Il retourna ses poches, ôta ses souliers, fit tâter ses vêtements à qui voulut. Puis, il procéda à un examen analogue sur la personne de chacun de ses hommes. Enfin, les convives défilèrent un à un devant lui et furent successivement soumis à une investigation minutieuse.