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Un incident, d’ailleurs sans gravité, interrompit la monotonie de cette dernière. Vers cinq heures de l’après-midi, on informa Camaret que la pompe refoulant l’eau de la rivière dans le réservoir ne fonctionnait plus.

Vérification faite, l’ingénieur reconnut que la nouvelle était exacte. La pompe était affolée, comme si elle eût tourné à vide, sans avoir à vaincre aucune résistance. Sur son ordre, on procéda au démontage du piston, dont les garnitures, probablement endommagées, ne devaient plus s’appliquer exactement sur la paroi du cylindre. Il ne s’agissait, en somme, que d’une réparation insignifiante, qui serait achevée en moins de quarante-huit heures.

Avant l’aube du lendemain, se termina enfin cette attente énervante. Ainsi qu’on peut le croire, personne ne manqua au rendez-vous, malgré l’heure matinale fixée par Marcel Camaret. De son côté, celui-ci avait tenu sa promesse. Quand on arriva dans le jardin, où l’essai devait avoir lieu, le planeur y était déjà transporté par les ouvriers qui l’avaient construit.

L’ingénieur monta sur la plate-forme, et mit le moteur en marche. Quelques minutes s’écoulèrent, trop lentement au gré des spectateurs, qui redoutaient une déception toujours possible. Ils furent bientôt rassurés. L’appareil s’enleva tout à coup sans effort, puis, déployant ses ailes, il glissa sur les couches d’air et revint se poser juste à l’endroit d’où il était parti. Marcel Camaret, emmenant cette fois dix hommes avec lui, s’éleva de nouveau, et, à trois reprises, accomplit le tour entier du jardin. L’expérience était concluante.

— Ce soir, à neuf heures, le premier départ, annonça-t-il en descendant de la plate-forme.

Alors, tout fut oublié, le siège, la captivité, ces jours d’inquiétude et d’ennui. Dans quelques heures, ce cauchemar serait fini. On serait libre. On se congratulait, on se félicitait réciproquement, pendant que les mécaniciens rentraient le planeur dans sa remise, d’où il sortirait, la nuit venue, pour s’envoler vers Tombouctou.

L’évacuation de l’Usine devant exiger plusieurs jours, les travaux habituels ne furent pas interrompus. On acheva donc, notamment, pendant cette journée du 12 avril, le démontage de la pompe. Quand il fut terminé, force fut de constater qu’elle n’avait aucune avarie. Il fallait donc chercher ailleurs la cause du trouble, et, pour l’instant, il n’y avait qu’à la remonter, travail qui fut entrepris sur-le-champ.

À huit heures et demie du soir, l’obscurité étant complète, Marcel Camaret donna enfin le signal du départ. Depuis longtemps déjà, les huit prisonniers échappés aux griffes d’Harry Killer et deux femmes d’ouvriers, qui devaient former le premier