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TRISTE MAISON D’UN RICHE.

Il y avait à Corfou, à l’extrémité de la Strada Reale, une vieille maison de peu d’apparence, moitié grecque, moitié italienne d’aspect. Dans cette maison demeurait un personnage, qui se montrait peu, mais dont on parlait beaucoup. C’était le banquier Elizundo. Était-ce un sexagénaire ou un septuagénaire ? on n’aurait pu le dire. Depuis une vingtaine d’années, il habitait cette sombre demeure, dont il ne sortait guère. Mais, s’il n’en sortait pas, bien des gens de tous pays et de toute condition, — clients assidus de son comptoir, — l’y venaient visiter. Très certainement, il se faisait des affaires considérables dans cette maison de banque, dont l’honorabilité était parfaite. Elizundo passait, d’ailleurs, pour être extrêmement riche. Nul crédit, dans les îles Ioniennes et jusque chez ses confrères dalmates de Zara ou de Raguse, n’aurait pu rivaliser avec le sien. Une traite, acceptée par lui, valait de l’or. Sans doute, il ne se livrait pas imprudemment. Il paraissait même très serré en affaires. Les références, il les lui fallait excellentes, les garanties, il les voulait complètes ; mais sa caisse semblait inépuisable. Circonstance à noter, Elizundo faisait presque tout lui-même, n’employant qu’un homme de sa maison, dont il sera parlé plus tard, pour tenir les écritures sans importance. Il était à la fois son propre caissier et son