hommes ne tardèrent pas à être désarçonnés. On ne se voyait plus, on ne s’entendait plus, on ne s’appartenait plus. Le tourbillon enveloppait tout, en se dirigeant vers les plaines méridionales du Djerid.
La route que le lieutenant Villette suivait dans ces conditions, il ne pouvait s’en rendre compte. Que ses hommes et lui eussent été poussés vers le chott, c’était vraisemblable, mais en s’éloignant du campement. Heureusement une pluie torrentielle survint. La trombe, sous les coups des rafales, s’anéantit, au milieu d’une obscurité déjà profonde.
La petite troupe était alors dispersée. Il fallut la rallier non sans peine. D’ailleurs, à la lueur des éclairs, le lieutenant avait reconnu que l’oasis ne se trouvait pas à plus d’un kilomètre un peu dans le sud-est.
Enfin, après des appels réitérés dans les courtes accalmies, hommes et chevaux étaient rassemblés, lorsque soudain le maréchal des logis-chef de s’écrier :
« Où est donc l’Arbico ?… »
Les deux spahis chargés de surveiller Mézaki ne purent répondre. Ce qu’il était devenu, ils ne le savaient, ayant été séparés violemment l’un de l’autre au moment où la trombe les entraînait dans ses tourbillons.
« Le gueux !… il a filé !… répétait le maréchal des logis-chef. Il a filé, et son cheval… ou plutôt notre cheval avec lui… Il nous a trompés, l’Arbico, il nous a trompés !… »
L’officier, réfléchissant, se taisait.
Presque aussitôt éclatèrent des aboiements furieux, et, avant que Nicol songeât à le retenir, le chien s’élançait et disparaissait en bondissant vers le chott.
« Ici… Coupe-à-cœur… ici !… » criait le marchef, très inquiet.
Mais, soit qu’il ne l’eût pas entendu, soit qu’il n’eût pas voulu l’entendre, le chien disparut au milieu de l’obscurité.
Après tout, peut-être Coupe-à-cœur s’était-il jeté sur les traces