tour, viendrait dire : « Ma vie et celle de mes compagnons pour celle de mes prisonniers », il serait assurément écouté… Et j’estime que ce jour est prochain, car le double coup d’audace de Hadjar doit être connu à l’heure qu’il est, et bientôt il aura en face de lui troupes, maghzen et goums envoyés à notre délivrance.
— Il est possible que vous ayez raison, répondit le capitaine Hardigan. Mais ne point oublier que ce Hadjar est un homme vindicatif et cruel… Sa réputation est établie à cet égard. Raisonner comme nous raisonnerions, nous, ce n’est pas dans sa nature. Il a une vengeance personnelle à exercer…
— Et précisément contre vous, mon capitaine, fit observer le brigadier Pistache, puisque vous l’aviez proprement pincé il y a quelques semaines.
— En effet, brigadier, et même je m’étonne que, m’ayant reconnu, sachant qui je suis, il ne se soit pas tout d’abord livré à quelque violence !… Au surplus, nous verrons… Ce qui est certain, c’est que nous sommes entre ses mains, et que nous ignorons le sort de Villette et de Pointar, comme ils ignorent le nôtre.
« Cela dit, je ne suis point homme, mon cher de Schaller, à être le prix de la liberté de Hadjar, ni à être le trophée de sa vie de brigand.
« Coûte que coûte, il faut nous échapper, et, lorsque le moment propice me semblera venu, je ferai l’impossible pour sortir d’ici ; mais, pour moi, je veux être libre et non un prisonnier échangé quand je paraîtrai devant mes camarades et je veux aussi garder ma vie pour me retrouver, revolver ou sabre en main, face à face avec le brigand qui, par surprise, s’est emparé de nous. »
Si le capitaine Hardigan et M. de Schaller méditaient des plans d’évasion, Pistache et M. François, quelque décidés qu’ils fussent à suivre leurs chefs, comptaient davantage sur le secours du dehors, et peut-être même sur l’intelligence de leur ami Coupe-à-cœur.