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Page:Verne - L’Invasion de la mer.djvu/210

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l’invasion de la mer

réflexions. Au cours des quelques propos qu’ils échangèrent, le brigadier fut amené à dire :

« Est-ce que ces gueux-là voudraient nous laisser mourir de faim ? »

Non, ce n’était pas ce qu’il y avait à craindre. Avant la dernière étape, à dix kilomètres de Zenfig, la bande de Touareg avait fait halte, et les captifs avaient eu leur part des provisions chargées sur les méharis. Assurément, le soir venu, le capitaine Hardigan et ses compagnons auraient volontiers pris quelque nourriture. Mais la faim ne deviendrait intolérable que le lendemain, si, dès l’aube, on ne leur fournissait pas des vivres en quantité suffisante.

« Essayons de dormir, dit l’ingénieur…

— Et de rêver que nous sommes en face d’une table bien servie, ajouta le brigadier : des côtelettes, une oie farcie, une salade…

— N’achevez pas, brigadier, recommanda M. François, et comme on se contenterait d’une bonne soupe au lard ! »

Maintenant, quelles étaient les intentions de Hadjar à l’égard de ses prisonniers ? Il avait certainement reconnu le capitaine Hardigan. Ne voudrait-il pas le punir, à présent qu’il le tenait ? Ne le ferait-il pas mettre à mort et ses compagnons avec lui ?…

« Je ne le pense pas, déclara M. de Schaller. Il n’est pas probable que notre vie soit menacée… Les Touareg, au contraire, ont intérêt à nous garder comme otages en prévision de l’avenir. Or, pour empêcher que les travaux du canal ne s’achèvent, il est à supposer que Hadjar et les Touareg renouvelleront leurs attaques contre le chantier du kilomètre 347, si les ouvriers de la Société y reviennent. Hadjar peut échouer dans une nouvelle tentative… Il peut retomber entre les mains des autorités et, cette fois, on le garderait si bien qu’il ne parviendrait pas à s’enfuir. Il est donc bon pour lui que nous soyons encore en son pouvoir… jusqu’au jour où Hadjar, menacé d’être repris à son