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LA CHASSE AU MÉTÉORE

gers cependant venaient d’être éprouvés par le mal de mer. Cinq ou six d’entre eux estimèrent que cela suffisait, et, renonçant au voyage, débarquèrent à Boston. Assurément, ce n’étaient ni Mr Dean Forsyth, ni le docteur Hudelson. Dussent-ils, sous les coups de roulis et de tangage, en arriver à leur dernier souffle, du moins le rendraient-ils en face du météore, objet de leurs vœux passionnés.

Le débarquement de ces quelques passagers moins endurants laissa libres plusieurs des cabines du Mozik. Elles ne manquèrent pas d’amateurs qui en profitèrent pour prendre passage à Boston.

Parmi ceux-ci, on aurait pu remarquer un gentleman de belle allure, qui s’était présenté des premiers pour s’assurer l’une des cabines vacantes. Ce gentleman n’était autre que Mr Seth Stanfort, l’époux de Mrs Arcadia Walker, marié, puis divorcé, dans les conditions que l’on sait, par devant le juge Proth de Whaston.

Après la séparation, qui remontait déjà à plus de deux mois. Mr Seth Stanfort était rentré à Boston. Toujours possédé du goût des voyages, et la note de J. B. K. Lowenthal le forçant à renoncer à celui du Japon, il avait visité les principales villes du Canada : Québec, Toronto, Montréal, Ottawa. Cherchait-il à oublier son ancienne femme ? Cela semblait peu probable. Les deux époux s’étaient plu d’abord, ils s’étaient déplu ensuite. Un divorce, aussi original que leur mariage, les avait séparés l’un de l’autre. Tout était dit. Ils ne se reverraient jamais sans doute, ou, s’ils se revoyaient, peut-être ne se reconnaîtraient-ils pas.

Mr Seth Stanfort venait d’arriver à Toronto, la capitale actuelle du Dominion, lorsqu’il eut connaissance de la sensationnelle communication de J. B. K. Lowenthal. Quand bien même la chute aurait dû s’effectuer à quelques milliers de lieues, dans les régions les plus reculées de l’Asie ou de l’Afrique, il aurait fait l’impossible pour s’y rendre. Ce n’est point que ce phénomène météorique l’intéressât autrement, mais assister à un spectacle qui ne compterait qu’un nombre relativement restreint de spectateurs, voir ce que des millions d’êtres humains ne verraient pas, cela était bien pour tenter un aventureux gentleman, grand amateur de déplacements, et auquel sa fortune permettait les plus fantaisistes voyages.

Or, il ne s’agissait pas de partir pour les antipodes. Le théâtre