composent sont tout simplement une merveille de l’architecture du pays.
Que l’on se figure deux espèces de pagodes sans minarets, avec leurs toits à double faîtage, arrondis en dômes ventrus, l’encorbellement de leurs fenêtres que supportent des pilastres sculptés, leur ornementation en découpages multicolores de bois précieux, leurs contours que dessinent gracieusement des courbes élégantes, les vérandahs si richement disposées, qui les terminent à l’avant et à l’arrière. Oui ! deux pagodes que l’on croirait détachées de la colline sainte de Sonnaghur, et qui, reliées l’une à l’autre, à la remorque de cet éléphant d’acier, allaient courir les grandes routes !
Et ce qu’il faut ajouter, car cela complète bien ce prodigieux appareil de locomotion, c’est qu’il peut flotter. En effet, la partie inférieure du corps de l’éléphant, qui contient chaudière et machine, forme bateaux de tôle légère, dont une heureuse disposition de boîtes à air assure la flottabilité. Un cours d’eau se présente-t-il, l’éléphant s’y lance, le train suit, et les pattes de l’animal, mues par les bielles, entraînent tout Steam-House. Avantage inappréciable dans cette vaste contrée de l’Inde, où abondent des fleuves dont les ponts sont encore à construire.
Tel était donc ce train, unique en son genre, et tel l’avait voulu le capricieux rajah de Bouthan.
Mais si Banks avait respecté cette fantaisie qui donnait au moteur la forme d’un éléphant, et aux voitures l’apparence de pagodes, il avait cru devoir aménager l’intérieur au goût anglais, en l’appropriant pour un voyage de longue durée. C’était très réussi.
Steam-House, ai-je dit, se composait de deux chars, qui, intérieurement, ne mesuraient pas moins de six mètres de largeur. Ils dépassaient, par conséquent, les essieux des roues, qui n’en avaient que cinq. Suspendus sur des ressorts très longs et d’une extrême flexibilité, les cahots leur étaient aussi peu sensibles que les plus faibles secousses sur une voie de fer bien établie.
Le premier char avait une longueur de quinze mètres. À l’avant, son élégante vérandah, portée sur de légers pilastres, abritait un large balcon, sur lequel une dizaine de personnes pouvaient se tenir à l’aise. Deux fenêtres et une porte s’ouvraient sur le salon, éclairé en outre par deux fenêtres latérales. Ce salon, meublé d’une table et d’une bibliothèque, garni de divans moelleux dans toute sa largeur, était artistement décoré et tendu de riches étoffes. Un épais tapis de Smyrne en cachait le parquet. Des « tattis »,