Page:Verne - Le Beau Danube Jaune.djvu/83

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

ix

À LA SORTIE DES PETITES KARPATES

Quelques jours plus tard, deux hommes causaient, buvant et fumant, dans une auberge isolée, sur la route qui descend vers le Danube à l’orée des Petites Karpates. Les dernières ramifications de ces montagnes de la Hongrie viennent expirer à la rive gauche du fleuve, un peu en amont de Presbourg[1], ville importante du royaume, située entre Vienne et Buda-Pest. Là s’ouvre aussi la bouche de la Morave[2], un des principaux affluents du fleuve.

Ces deux hommes étaient attablés au fond d’une chambre basse, où personne ne pouvait ni les voir ni les entendre. Une fenêtre latérale, vitrée de gros verres à maillons, leur permettait d’observer obliquement gens ou bêtes qui passaient sur la route en longeant la gauche de la Morave, dont le courant entraînait quelques bateaux vers son confluent.

Cette auberge n’était guère fréquentée que par les mariniers et les rouliers, lorsqu’ils s’y arrêtaient soit pour absorber quelque violente boisson, soit pour prendre leur repas. Les voyageurs peu difficiles à satisfaire pouvaient y loger la nuit, sans trop alléger leur bourse. Mais il était rare que l’aubergiste, sa femme et son valet ne fussent pas seuls à la nuit. Une étroite écurie, en annexe sur le côté, suffisait à recevoir un ou deux attelages.

Ce matin, deux charrettes, dont une épaisse bâche en toile goudronnée recouvrait le chargement, étaient arrivées devant l’auberge. Le maître de l’endroit les attendait sans doute, et connaissait les deux rouliers qui les conduisaient.

La première question qu’adressèrent ces hommes — précisément ceux qui buvaient alors dans la salle basse — fut celle-ci :

  1. Actuellement Bratislava, ville de Tchécoslovaquie (NDLR).
  2. March en allemand (NDLR).
84