Page:Verne - Le Château des Carpathes.djvu/126

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— Nous croyons ce que nous avons vu, monsieur le comte, répondit maître Koltz.

— Et ce qui est, ajouta le magister.

— Soit, et, vraiment, je regrette de ne pouvoir disposer de vingt-quatre heures, car Rotzko et moi, nous serions allés visiter votre fameux burg, et je vous assure que nous aurions bientôt su à quoi nous en tenir…

— Visiter le burg !… s’écria maître Koltz.

— Sans hésiter, et le diable en personne ne nous eût pas empêchés d’en franchir l’enceinte. »

En entendant Franz de Télek s’exprimer en termes si positifs, si moqueurs même, tous furent saisis d’une bien autre épouvante. Est-ce que de traiter les esprits du château avec ce sans-gêne, cela n’était pas pour attirer quelque catastrophe sur le village ?… Est-ce que ces génies n’entendaient pas tout ce qui se disait à l’auberge du Roi Mathias ?… Est-ce que la voix n’allait pas y retentir une seconde fois ?

Et, à ce propos, maître Koltz apprit au jeune comte dans quelles conditions le forestier avait été, en nom propre, menacé d’un terrible châtiment, s’il s’avisait de vouloir découvrir les secrets du burg.

Franz de Télek se contenta de hausser les épaules ; puis, il se leva, disant que jamais aucune voix n’avait pu être entendue dans cette salle, comme on le prétendait. Tout cela, affirma-t-il, n’existait que dans l’imagination des clients par trop crédules et un peu trop amateurs du schnaps du Roi Mathias.

Là-dessus, quelques-uns se dirigèrent vers la porte, peu soucieux de rester plus longtemps en un logis où ce jeune sceptique osait soutenir de pareilles choses.

Franz de Télek les arrêta d’un geste.

« Décidément, messieurs, dit-il, je vois que le village de Werst est sous l’empire de la peur.

— Et ce n’est pas sans raison, monsieur le comte, répondit maître Koltz.