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XXII

Était-ce le hasard seul qui avait mis Buch sur nos traces ? J’inclinais à le croire, car, depuis quelque temps le hasard ne se montrait plus notre ami. Mais, par la suite, nous apprîmes ce que nous ne pouvions savoir alors : c’est que depuis notre dernière rencontre, le fils Buch n’avait cessé ses recherches, moins pour venger la mort de son frère, croyez-le bien, que pour gagner la prime de mille florins. S’il avait perdu nos traces à partir du jour où nous avions pris à travers l’Argonne, il les avait retrouvées au village de la Croix-aux-Bois. Il était de ces espions qui l’envahirent dans l’après-midi du 16. Chez les Stenger, il reconnut M. et Mlle de Lauranay, Mme Keller et ma sœur. Il apprit que nous venions de les quitter à l’instant. Nous ne pouvions être loin. Une demi-douzaine de coquins de son espèce se joignirent à lui. Tous se lancèrent à notre poursuite. On sait le reste.

Maintenant, nous étions gardés de manière à défier toute évasion, en attendant que notre sort fut réglé — ce qui ne pouvait être ni long ni douteux — et, comme on dit, il n’y avait plus qu’à écrire à sa famille !

Tout d’abord j’examinai la chambre qui nous servait de prison. Elle occupait la moitié du rez-de-chaussée d’une maison basse. Deux fenêtres, opposées l’une à l’autre, l’éclairaient sur la rue, en avant, et sur une cour, en arrière.

C’est de cette maison, sans doute, que nous ne sortirions que pour être conduits à la mort.

M. Jean, sous la double accusation d’avoir frappé un officier, et déserté en temps de guerre ; moi, accusé de complicité, et proba-