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Page:Verne - Le Sphinx des Glaces, 1897.djvu/41

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le capitaine len guy

que peu m’importe la destination de votre goélette… Il n’est pas déraisonnable de supposer qu’elle ira quelque part…

— Quelque part, en effet… »

Et, à ce moment, il me sembla que le capitaine Len Guy jetait un long regard vers l’horizon du sud.

« Eh bien, monsieur, repris-je, aller ici ou là m’est presque indifférent… Ce que je désirais avant tout, c’était de quitter les Kerguelen par la plus prochaine occasion qui me serait offerte… »

Le capitaine Len Guy ne répondit pas, et demeura pensif, sans chercher à me fausser compagnie.

« Vous me faites l’honneur de m’écouter, monsieur ?… demandai-je d’un ton assez vif.

— Oui, monsieur.

— J’ajouterai donc que, sauf erreur, et si l’itinéraire de votre goélette n’a pas été modifié, vous aviez l’intention de partir de Christmas-Harbour pour Tristan d’Acunha…

— Peut-être à Tristan d’Acunha… peut-être au Cap… peut-être… aux Falklands… peut-être ailleurs…

— Eh bien, capitaine Guy, c’est précisément ailleurs où je désire aller ! » répliquai-je ironiquement, en faisant effort pour contenir mon irritation.

Alors un changement singulier s’opéra dans l’attitude du capitaine Len Guy. Sa voix s’altéra, devint plus dure, plus cassante. En termes nets et précis, il me fit comprendre que toute insistance était inutile, que notre entretien avait déjà trop duré, que le temps le pressait, que ses affaires l’appelaient au bureau du port… enfin que nous nous étions dit, et de très suffisante façon, tout ce que nous pouvions avoir à nous dire…

J’avais étendu le bras pour le retenir — le saisir serait un mot plus juste, — et la conversation, mal commencée, risquait de plus mal finir, lorsque ce bizarre personnage se retourna vers moi, et d’un ton adouci, il s’exprima de la sorte :

« Croyez bien, monsieur, qu’il m’en coûte de n’être point en état