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campement.

Hearne était là, et aussi Martin Holt, qui, me sembla-t-il, ne cherchait pas à intervenir.

Ainsi donc, ces misérables voulaient s’emparer de l’embarcation et partir avant que le sort eût prononcé !… Ils voulaient nous abandonner !…

En effet, ils étaient parvenus à surprendre Dirk Peters, et ils l’auraient tué, s’il n’eût défendu sa vie dans une lutte terrible.

En présence de cette révolte, connaissant notre infériorité numérique, ne sachant s’il pouvait compter sur tous les anciens du bord, le capitaine Len Guy et le lieutenant rentrèrent dans la caverne afin d’y prendre des armes pour réduire à l’impuissance Hearne et ses complices qui étaient armés.

J’allais faire comme eux, lorsque ces paroles me clouèrent soudain sur place.

Accablé par le nombre, le métis venait d’être enfin terrassé. Mais, à cet instant, comme Martin Holt, par reconnaissance envers l’homme qui lui avait sauvé la vie, s’élançait à son secours, Hearne lui cria :

« Laisse-le donc… et viens avec nous ! »

Le maître-voilier parut hésiter…

« Oui… laisse-le, reprit Hearne… laisse Dirk Peters… qui est l’assassin de ton frère Ned !…

— L’assassin de mon frère !… s’écria Martin Holt.

— Ton frère tué à bord du Grampus

— Tué… par Dirk Peters !…

— Oui !… tué… et mangé… mangé… mangé !… » répéta Hearne, qui hurlait plutôt qu’il ne prononçait ces horribles mots.

Et, sur un signe, deux de ses camarades se saisirent de Martin Holt, et ils le transportèrent dans l’embarcation, prête à déborder.

Hearne s’y précipita à sa suite avec tous ceux qu’il avait associés à cet acte abominable.

En ce moment, Dirk Peters se releva d’un bond, s’abattit sur l’un des Falklandais à l’instant où cet homme enjambait le plat-bord du