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Page:Verne - Le Superbe Orénoque, Hetzel, 1898.djvu/325

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TERRIBLES INQUIÉTUDES.

n’avait eu l’idée d’explorer le Cunucunuma ou le Cassiquiare, et Germain Paterne ne lui en toucha pas un mot, même en manière d’amicale plaisanterie.

Il y avait d’ailleurs un nouveau sujet d’inquiétude pour le sergent Martial, non moins que pour Jacques Helloch.

Si forte qu’elle fût, si endurante, si énergique aussi, il y eut lieu de craindre que Jeanne de Kermor, qui avait résisté jusqu’alors à tant de fatigues, ne payât son tribut au climat de ce pays. À la surface des parties marécageuses, règnent des fièvres endémiques, qu’il est difficile d’éviter. Grâce à leur accoutumance, les équipages étaient restés indemnes. Mais la jeune fille éprouvait depuis quelques jours un malaise général dont la gravité ne pouvait échapper.

Germain Paterne reconnut que Jeanne de Kermor était sous l’influence des fièvres paludéennes. Ses forces diminuaient, l’appétit faisait défaut, et, dès ce jour-là, une insurmontable lassitude l’obligea de s’étendre sous le rouf pendant des heures entières. Elle s’efforçait de résister, s’attristant surtout à la pensée de ce surcroît d’inquiétude pour ses compagnons de voyage.

Restait cependant l’espoir que cette indisposition ne serait que passagère… Peut-être le diagnostic de Germain Paterne était-il entaché d’erreur ?… Et, d’ailleurs, étant donné l’endurance morale et physique de Jeanne, la nature ne serait-elle pas son meilleur médecin et n’avait-elle pas le meilleur remède, la jeunesse ?…

Toutefois, ce fut en proie à de croissantes anxiétés que Jacques Helloch et ses compagnons reprirent la navigation sur le haut fleuve.

Les pirogues établirent leur halte de nuit à l’embouchure du Gabirima, un affluent de la rive gauche. On ne rencontra aucune trace de ces Indiens Barés, signalés par M. Chaffanjon. Il n’y eut pas trop à le regretter, puisque les deux cases du Gabirima, à l’époque où les visita le voyageur français, abritaient une famille d’assassins